Vous êtes nombreux à acheter des compléments alimentaires dans les pharmacies, les magasins bio ou sur Internet. Mais savez-vous ce qu'ils contiennent et leur recours est-il justifié ?
Les Français achètent des compléments alimentaires pour retrouver le sommeil, améliorer leur digestion et atténuer leurs douleurs articulaires. C'est le Top 3 des demandes. Un marché largement dominé pour le moment encore par les pharmacies (51 % des ventes totales). Probiotiques, curcuma, safran, magnésium, gelée royale ... les ventes explosent avec un marché en pleine croissance (+ 5,8 % entre 2016 et 2017).
C'est quoi un complément alimentaire ?
C'est "une denrée alimentaire dont le but est de compléter le régime alimentaire normal et qui constitue une source concentrée de nutriments ou une autre substance ayant un effet nutritionnel ou physiologique seule ou combinée (...) destinée à être prise en unités mesurées de faible quantité". Décret n°2006-356 du 20 mars 2006
Le nutraceutique ou produit de micronutrition est une substance active présente dans un aliment qui apporte un effet bénéfique à l'organisme.
L'alicament (contraction d'aliment et de médicament) ou aliment fonctionnel est un aliment de consommation courante auquel a été ajouté un micronutriment dont l'ensemble de la population est carencée (ex : les œufs de la filière Oméga-3 dont les poules ont été nourries avec des graines de lin).
Les compléments alimentaires sont élaborés à partir de nutriments ou de phytonutriments (caroténoïdes, flavonoïdes, glucosinolates ... ), avec des propriétés nutritionnelles ou physiologiques et non pharmacologiques. On trouve également des produits à base d'algues d'eaux douces (chlorella, spiruline, klamath) ou de mer (wakamé, fucus ...).
On parle de dose nutritionnelle pour les compléments alimentaires, ce qui veut dire qu'ils apportent ce que l'alimentation devrait nous apporter au quotidien. Les doses pharmacologiques ont un effet médical et n'entrent pas dans le champ de compétence des compléments alimentaires. Pour les apports recommandés, les appellations changent selon les pays. En Europe, on parle globalement d'AJR : Apports Journaliers Recommandés. En France, ce sont les ANC : Apports Nutritionnels Conseillés.
De nouvelles allégations santé
Avant la nouvelle réglementation européenne, 4 000 allégations santé apparaissaient sur les emballages alimentaires ou lors des campagnes publicitaires. Aujourd'hui, toute revendication doit être justifiée par une évaluation scientifique, des preuves cliniques ou un référencement dans des documents existants. C'est l'EFSA, autorité européenne de sécurité alimentaire, qui veille sur les allégations.
Il existe trois types d'allégations :
- nutritionnelles : comme par exemple riche en fibres
- fonctionnelles pour mentionner le rôle d'un nutriment reconnu scientifiquement
- relatives à la réduction d'un risque de maladie ou au développement et à la santé des enfants
Des compléments alimentaires pour qui ?
Les Français ne souffrent pas globalement de carences nutritionnelles majeures qui se manifestent par des signes cliniques. On ne parle plus du crétinisme dont les habitants des Alpes ont souffert par carence en iode ou du scorbut des marins par carence en vitamine C, lors des longues traversées en mer. On est plutôt dans la déficience d'apports (Apports Nutritionnels Recommandés : ANC), pour un certain nombre de vitamines, minéraux et oligo-éléments. Pourquoi ? Il y a plusieurs raisons à cela : alimentation trop riche en produits transformés et pauvre en micronutriments, appauvrissement des sols par une agriculture intensive, récolte prématurée des fruits et des légumes, mauvaise capacité d'absorption intestinale... Il faudrait consommer 4 000 calories par jour pour bénéficier des vitamines et des minéraux que l'on trouvait autrefois dans l'alimentation. La pomme d'aujourd'hui contient 100 fois moins de vitamines que celle d'il y a 50 ans et il faut 21 oranges pour bénéficier du même taux de vitamine C que celui d'une orange récoltée il y a 50 ans.
Les études alimentaires menées depuis trente ans soulignent des déficiences généralisées pour les vitamines du groupe B (B1, B2 et B6), C, D et E, le magnésium, le fer et le zinc. Avec une déficience de plus en plus marquée en Omega-3.
Etude Val de Marne (1988) : 30 à 50 % des femmes de 18 à 50 ans avaient des apports en vitamines B1 et B6 inférieurs aux 2/3 des ANC et 20 % des hommes du même âge des apports inférieurs aux 2/3 en vitamine C.
Etude S.U.V.I.M.A.X (1998) : 45 % des hommes et 61 % des femmes avaient des apports en calcium inférieurs aux ANC. Les chiffres étaient encore plus élevés pour le magnésium : 73 % des hommes et 77 % des femmes. 91 % des femmes avaient des apports insuffisants en fer.
Les compléments alimentaires ne se substituent pas à un régime alimentaire varié et équilibré.
Ils participent à la couverture des besoins micronutritionnels essentiels. Pris à des doses proches des apports nutritionnels recommandés (ANC), il n'y a pas de risque de surdosage. Les limites de sécurité ne doivent cependant pas être dépassées. Les compléments alimentaires peuvent présenter des risques par leur origine (traçabilité impossible pour des produits étrangers achetés sur Internet), le mauvais équilibre entre les composants et les surdosages. La complémentation a ses limites notamment pour les produits riches en antioxydants. L'aliment sera toujours plus intéressant qu'un complément car il ne comprend pas seulement un micro-constituant, mais parfois de 100 à 300 composés différents.
Info + Les compléments alimentaires doivent être achetés sur les conseils d'un pharmacien ou d'un praticien de santé formé en nutraceutiques.