Les Français manquent de vitamine D. A la sortie de l'hiver, cette insuffisance touche 90 % de la population.
On le sait désormais : on manque de vitamine D. Pourquoi ? Car nos modes de vie nous confinent à l'intérieur des bâtiments : bureau, magasins, cinémas et transports en commun... Or la principale source de vitamine D dépend de l'exposition au soleil. C'est pourquoi les personnes très âgées sont carencées à 100 %. Leur peau, affinée avec le temps, empêche la production de cette vitamine et leur vie passée exclusivement à l'intérieur les expose à l'ostéomalacie, l'équivalent du rachitisme chez les enfants. Les maladies inflammatoires chroniques, qui empêchent une bonne absorption intestinale de la vitamine D, prédisposent également à une carence.
Vitamine ou hormone ?
La vitamine D est le précurseur alimentaire d'une hormone, le calcitriol. Ce n'est donc pas vraiment une vitamine, mais une hormone. Cela veut dire que l'organisme, sous l'action du soleil, peut produire, dans les couches profondes de l'épiderme, de la vitamine D à partir d'un dérivé du cholestérol. L'alimentation nous en apporte très peu.
Une exposition raisonnée au soleil
Bénéficier des bienfaits du soleil, c'est impossible d'octobre à avril au-dessus de la Loire. Or non seulement on manque de soleil une bonne partie de l'année, mais on s'en surprotège quand il brille. Bien entendu, il ne s'agit de pas de "griller" et d'augmenter le risque de développer un cancer de la peau, mais un bain de soleil mesuré avant 11 h et après 16 h offre un apport intéressant en vitamine D. L'exposition quotidienne de 10-15 minutes du visage et des bras découverts est suffisante. En s’exposant partiellement au soleil, on produit 3 000 Unités internationales (UI) de vitamine D en douze minutes. Mais tout dépend de la latitude, de la pigmentation de la peau et des pollutions atmosphériques. Beaucoup de paramètres qui empêchent une synthèse optimale ! La disponibilité de la vitamine D dépend aussi du bon fonctionnement du foie et des reins.
L'huile de foie de morue, le cauchemar de nos aïeux
Les sources alimentaires de vitamine D sont rares. Il y a la vitamine D2 (ergocalciférol) que l'on trouve dans les végétaux et les champignons. La vitamine D3 (cholécalciférol), proche de celle que nous fabriquons, est d'origine animale. On la trouve dans les poissons gras (maquereau, morue, hareng, sardine, anchois...), les abats et le jaune d'œuf. Autrefois, on donnait de l'huile de foie de morue aux enfants pour éviter le rachitisme. Le goût était peu apprécié, mais la petite cuillère à café leur apportait 400 UI de vitamine D. Les laboratoires commercialisent l'huile de foie de morue en gélules. Plus facile pour le goût !
Faut-il prendre de la vitamine D ?
Pour les autorités françaises de santé, les valeurs plasmatiques optimales sont les suivantes :
- Carence en vitamine D : 25 (OH) D inférieure à 25 nmol/l (10 ng/ml)
- Déficit : 25 (OH) D entre 25 et 75 nmol/l (10-30 ng/ml)
- Concentrations normales : 25 (OH) D entre 75 et 250 nmol/l (30-100 ng/ml)
Le Dr Brigitte Roussin, auteur de "Vitamine D, mode d'emploi" et de "Soleil, mensonges et propagande" donne d'autres valeurs optimales. "Depuis 2007, les experts de la vitamine D démontrent qu’un taux minimal de vitamine D de 30 ng/ml est indispensable à la santé de l’os. Cependant la grande majorité des spécialistes anglo-saxons de la vitamine D estiment que son taux sanguin doit être supérieur pour prévenir le cancer et les maladies immunitaires. Certains préconisent ainsi un taux optimal de 40 à 45 ng/ml. D’autres vont nettement au-delà : 40 à 60 ng/ml, voire plus. La limite supérieure a été fixée à 100 ng/ml.(...) Atteindre des valeurs supérieures à 45 ng/ml n'est possible que si l’on se supplémente."
Il est difficile de définir une valeur propre à chacun en raison d'un polymorphisme des récepteurs à la vitamine D. Le taux dépend d'une bonne absorption intestinale également très variable. Un surdosage est toujours possible, mais très rare. Au-delà de 50 ng/ml circulant, la vitamine D se stocke en réserve dans les tissus adipeux et les muscles pour une utilisation ultérieure, par un mécanisme de régulation interne.
Des récepteurs à la vitamine D dans une grande partie de nos tissus
L'action de la vitamine D sur l'équilibre phosphocalcique est reconnue. Elle participe à la croissance et au maintien de la minéralisation osseuse. Une carence grave est responsable du rachitisme chez l'enfant, un défaut de calcification et de fixation du phosphore dans les os et d'ostéomalacie chez l'adulte et la personne âgée. S'il y a carence, l'organisme mobilise le calcium des os pour maintenir des taux sériques normaux, ce qui génère une perte osseuse.
L'autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a reconnu à la vitamine D une contribution dans le maintien d'une fonction musculaire normale après 60 ans et dans la prévention des risques de chutes.
Mais l'action de la vitamine D est beaucoup plus importante, car le corps a des récepteurs à la vitamine D sur les cellules de la plupart des tissus.
Les études sont nombreuses à démontrer le rôle extra-osseux de la vitamine D.
En tant que modulateur de l'immunité, elle limite l'inflammation anormale, réduit l'incidence de la grippe saisonnière et du rhume et améliore les symptômes de la tuberculose chez les enfants.
Au moins 229 gènes du corps humain sont influencés par la vitamine D. Elle pourrait activer deux gènes suppresseurs de cancers.
Des liens ont été démontrés entre carence en vitamine D et risque de dépression et de déclin cognitif. La vitamine D est associée à une diminution par cinq du risque d'Alzheimer chez les seniors.
La vitamine D jouerait un rôle protecteur dans les maladies auto-immunes (sclérose en plaques dont un faible niveau en vitamine D doublerait le risque d'en être victime, diabète de type 1, lupus érythémateux, polyarthrite rhumatoïde...) et cardio-vasculaires. Elle agirait sur le métabolisme insulino-glucidique. Les personnes en pré-diabète sucré auraient un risque plus important de déclarer un diabète de type 2 en cas de carence en vitamine D.
Les études se suivent, mettant en avant le rôle majeur de la vitamine D dans tout l'organisme. Le Jama Ophtalmology signale que les personnes carencées en vitamine D ont un risque 2,6 fois plus important de dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA), contrairement aux personnes ayant un bon statut.
L'unité 1153 de l'INSERM recommande une activité de plein air suffisante d'avril à octobre, une exposition légère et régulière au soleil dans sa vie quotidienne et d'éviter le surpoids car la vitamine D est stockée et inactive dans la graisse accumulée.
Info +
Les enfants ne doivent pas s'exposer au soleil avant l'âge de trois ans. Très souvent surexposés lors de leurs activités de loisirs, ils sont sujets aux coups de soleil. Il est nécessaire de les protéger par des vêtements couvrants, un chapeau et une crème à indice de protection élevé. Une supplémentation en vitamine D ne peut se faire que sous contrôle médical.
Sources : www.lanutrition.fr / Vitamine D, mode d'emploi. Dr Brigitte Roussin. Thierry Souccar Editions./ Et si vous manquiez de vitamine D ? Didier Le Bail. Editions Mosaiques./Jean-Marie Magnien. Naturo Express n° 86